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Notes

3e édition de 1735.
 
« Pour le coup, on a découvert où s’imprimait la Gazette ecclésiastique. On cherchait dans les imprimeries un mémoire de l’affaire du père Girard que l’on voulait supprimer. M. Chauvelin le jeune, directeur de la Librairie, fit une visite le 20 de ce mois, avec les syndics, lesquels lui épargnèrent la peine de monter à un troisième étage, dans la rue de la Parcheminerie, chez un nommé [Joseph] Bullot, lui disant que c’était un homme qui ne se mêlait d’aucune affaire et chez lequel on n’avait jamais rien trouvé (et ils étaient dans la bonne foi) ; qu’il suffirait l’après-midi, d’y envoyer deux adjoints. Le même jour, Dumesnil et David, libraires, y allèrent, et ils furent fort étonnés de voir dans l’imprimerie qu’on travaillait à la feuille de la Gazette ecclésiastique que l’on attendait. Ils firent du bruit ; les garçons quittèrent tout et s’enfuirent. Ces adjoints allèrent sur-le-champ en avertir M. Hérault. On envoya un commissaire avec des exempts pour saisir et arrêter ; mais Bullot était déjà bien loin et on n’a attrapé que la femme, que l’on a conduite en prison, laquelle ne découvrira rien et ne sait rien, pour savoir l’auteur de cette gazette, laquelle ne discontinuera pas, suivant les apparences, pour cette aventure. Cela se fait même, dit-on, si secrètement que Bullot lui-même, imprimeur, ne connaissait pas celui qui lui apportait la minute. Mais il faut pourtant qu’il eût correspondance avec quelqu’un sur la parole de qui il se fiait. Les libraires avouent qu’ils ne se seraient jamais méfiés de cet homme pour un coup aussi hardi. On a beaucoup blâmé Gosselin et David d’avoir ainsi perdu leur confrère, d’autant que leur mission n’était point pour cela. Il fallait ne pas donner à entendre aux garçons qu’ils s’étaient aperçus de cela et faire à Bullot toutes les réprimandes qu’il méritait, pour lui faire cesser un ouvrage aussi défendu. Le premier mouvement a fait peut-être tout le tort de ces deux visiteurs, car, paraissant une fois l’avoir vu devant les garçons, ils ne pouvaient plus se taire sans risquer de se perdre eux-mêmes ». (Journal de Barbier, septembre 1731)
 

« Il faut avouer aussi qu’il n’est pas possible de découvrir, par exemple, l’auteur des Nouvelles ecclésiastiques, car cela fait tant de cascades entre les mains de plusieurs personnes, d’ailleurs tous honnêtes gens, que cet auteur n’est jamais connu de ceux qui peuvent être arrêtés.
Quand l’auteur des Nouvelles ecclésiastiques a composé sa feuille sur les matériaux qu’il a, il jette les mémoires au feu, il donne sa minute à un autre ; on la copie, alors on jette la minute au feu ; une troisième personne porte la minute chez un imprimeur. Cette personne vient prendre les exemplaires pour les distribuer dans Paris. Il y a peut-être 20 bureaux dans plusieurs quartiers, c’est-à-dire 20 particuliers, qui enprennent 100, supposé, chacun. Ce n’est pas la même personne qui porte les 100 à ces 20 bureaux ; ce sont 20 personnes différentes, et celui qui tient ce bureau paye les 100 exemplaires à celui qui leslui apporte. Il en a un pour lui gratis, de même que de tout ce qui s’imprime sur les affaires du temps. Et cet homme sait à qui donner ces exemplaires pour retirer son argent. Si on arrêtait, aujourd’hui matin, un de ces particuliers ayant un bureau, sur-le-champ on avertit tous les autres, et on transporte les exemplaires dans un autre endroit, crainte de découverte, en sorte que, quelques personnes qu’on arrête, la manivelle va toujours, et il n’est quasi pas possible d’arrêter le cours de ces nouvelles.» (Journal de Barbier, septembre 1731)
 

Année

1731

Tome

2